Affichage des articles dont le libellé est politik. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est politik. Afficher tous les articles

jeudi 8 décembre 2016

3615 Ma Chatte

Bon c'est officiel, j'en ai marre. 

Je n'aime pas les blogposts coups de gueule mais là j'en ai marre. Sans doute une overdose d'articles politiques, informatifs, militants ou poubelles. Peu importe. Je dégueule sur les articles concernant Hamilton et ses photos. C'est qui le coupable blabla blabla. C'est de l'art blablabla. Mais c'est l'époque qui veut ça bla-bla-bla. Je dégueule sur les articles concernant le nouvel amendement Heartbeat en matière d'avortement aux USA. Aux USA, mais ici, là-bas, quelle que soit sa forme. Forme, faut-il le dire, souvent édictée par des culs-serrés, des frustrés, des violeurs, des abuseurs intra familiaux, des ultrareligieux. Je dégueule sur les articles des politiques annoncées des candidats de (presque) tout bords, de presque tous pays. Ils représentent le recul face à des combats si chèrement remportés. Faut-il encore et encore y revenir? Je dégueule sur le nombre de femmes violées, abusées, vendues, exploitées. Je dégueule sur nos mentalités européennes qui nous font croire que nous ne sommes pas comme ça, "nous". Je dégueule sur la déresponsabilisation des coupables et la recherche de la faute chez les victimes. J'en ai marre de faire partie d'une minorité et j'en ai marre des minorités exploitées. J'en ai marre que le vagin - le mot et le calice - soit l'objet de tant de méfiance, de tant de violation et de si peu de respect. Ce mot si difficile à prononcer en termes d'amour pour la plupart et si rapide à venir dans l'insulte. J'en ai marre que tant de désir mène à tant de destruction. Je ne me suis pas réveillée féministe ou avec un trop plein d'hormones, merci de chercher l'explication ailleurs. Parce que féministe ce n'est pas une insulte. Et mes hormones c'est ce qui te fait bander. Fais chier! Marre de la politique de la peur du vagin, marre de lire qu'on décide à ma place de ce que je veux faire de mon utérus, que même des femmes s'arrogent le droit de penser pour moi. J'en ai même marre de crier que putain j'aime ma chatte et que j'en suis fière. Marre de crier que j'aime être une femme parce que cela fait de moi une forte, une force. Marre parce qu'en être fière m'oblige à reconnaître qu'il y a des différences dont je dois me défendre plutôt que de vivre paisiblement et amoureusement avec. J'en ai ras-le-cul, ras-la-chatte. Je ne sais même plus ce que je dois détester, j'en perds mon second degré. Je n'ai pas envie de voir les décérébrés relativiser qu'on embrasse des seins chez Hanouna ou qu'on attrape les femmes par la chatte chez Trump. Je suis en rage de devoir apprendre à mes filles à être prudentes et raisonnables et de me demander si les mères des garçons qu'elles côtoient se donne la peine de leur inculquer les notions de respect et d'égalité. Je me demande si je suis parano ou réaliste quand je retiens mon souffle à 23h dans le métro en voyant monter un groupe de mecs éméchés. Je m'égare, dois-je maigrir pour moi, ma santé ou pour l'image? Me faire belle pour qui? Je réponds à des dictats ou à des désirs? Je ne sais même plus ce que veut dire d'être une femme quand le prix à payer est celui des autres. Alors j'ai des envies de couper des couilles et sectionner des canaux. Et je ne me reconnais pas, moi, qui dis et redis à l'envie de vivre et laisser vivre. Je voudrais dire peace and love mais je ne peux pas quand tant de cons me disent quoi faire du mien. Et je me dis que tous ces cons sortent toujours de celui de leur mère. La boucle est bouclée. 

Voilà quoi. 

samedi 14 novembre 2015

#JeSuisPerdue

Après les attentats à Charlie Hebdo j'ai affiché que j'étais Charlie. A l'époque une amie m'a demandé  "et demain tu seras quoi?". C'était finalement une assez bonne question. 

Avant Charlie j'étais des tas de choses. Avant que l'indignation solidaire ne devienne une marque déposée, je me sentais libre d'être ce que je voulais. Je n'avais ni gradations dans mes indignations ni priorités. Après Charlie j'ai continué à être des tas de choses mais avec des nuances dans mes libertés. Avec cet organe de com' bien huilé qu'est devenu le #JeSuis, les convictions se sont diluées dans un phénomène de masse qui les a rendues aussi pauvres que ridicules. Les #JeNeSuisPas ont fleurit. Que dire quand aujourd'hui ce sont les #Prayers qui ont pris le pas.

#JeSuisPriseDeStupeur parce que Paris est ma voisine, parce que Paris me ressemble. #JeSuisProfondémentDésolée pour les familles endeuillées et touchée par le fracas intérieur dans lequel se sont réveillés les survivants.

Mais. 

Je ne suis pas Paris. Nous ne sommes pas tous Paris. Je n'ai pas besoin d'être Paris.

Nous ne sommes pas tous le Liban, ni les enfants Syriens, ni les réfugiés qui survivent ou meurent chaque jour sur les côtes de Lesbos, ni Gazaouis, ni Grecs, ni le Musée Juif de Bruxelles, ni homosexuels, ni condamnés à mort, ni Burundais. Ni eux, ni tous les autres. 

#JeSuisEnColère parce que j'aimerais que cette violence ne nous paraisse pas moindre quand elle est si loin de nous le reste du temps. La stupeur des parisiens est celle de millions de personnes au quotidien. 

#JeSuisInquiète. Le drame n'a qu'un temps et la réflexion sur ses causes est encore plus brève.

Ce matin j'ai perdu mon dièse et je ne suis plus solidaire d'un peuple. 

Ce matin je suis solidaire du genre humain.
Ce matin je ne suis personne à moins d'être chacun. 

mardi 14 juillet 2015

Les grands méchants loups

'Pour faire le moins de mécontents possible, il faut toujours taper sur les mêmes'
 - Les Shadocks - 
 
J'avais pris cette habitude de commencer ma journée par la publication sur Facebook de la petite nouvelle du jour, puisée dans l'actualité. Ça fait un moment que j'ai jeté l'éponge et le clavier. Je ne sais plus où donner de la tête. Je ne sais plus choisir sur quel malheur du jour je pourrais jeter mon cynisme et mon ironie. Les mesures du gouvernement belge? Les migrants qui se noient? Le dernier rhinocéros blanc qui a une protection rapprochée? La chasse à la girafe? Ces gens qui meurent partout dans le monde parce qu'il y a la guerre et la famine et que parfois on ne sait même pas où se trouve ces régions? La peine de mort qui n'en finit pas d'exécuter des innocents et parfois même des coupables? Les vieilles à la pension qui font des bébés? L'EI qu'on est impuissant à enrayer? (là je pourrais friser la théorie du complot si on me lance). Les pollutions qui deviennent la norme? Les théories alarmistes et les dénis de catastrophes? Les grands patrons? Les invisibles puissants? Les assassinats? Les élections qui n'en sont pas? Et comment y échapper ces dernières semaines, le Grexit ou pas? 

L'actualité me donne des envies de suicide. Ou de changement. 

Et là je me dis (souvent à 7h39, avant mon café, ce qui explique sans doute ceci) que le changement pourrait être aussi simple que de dire non. 

Non je n'appliquerai pas des mesures contraires au respect du droit humain, non je n'appliquerai pas des mesures prises par des personnes qui ne me ressemblent pas. Non, je dis non tout simplement. Non, je refuse d'obéir. 

Non, ce n'est pas parce que je peux que je dois. Non, mille fois non, à la tristesse du monde.

Ça fait j'ai-14-ans-des-boutons-et-un-appareil-dentaire. Parce que c'est un peu simple et court comme raisonnement. Certes. Mais que risque-t-on si tout le monde dit non? Rien. On ne peut rien faire si personne ne veut y faire. Refuse d'être le bras. 

Non, ne m'oppose pas l'équilibre économique. Celui là même qui nous pousse à nous enfoncer toujours plus loin. Non, ne m'oppose pas la nécessité de l'ordre et de la Loi, quand l'ordre se travestit pour faire de nous ses bourreaux et devient contraire à sa loi. Trop compliqué, sans résultats.

Pense grain de sable ou même mieux, ne pense pas.

Je ne veux pas de plans de bataille, je ne veux pas de solutions, je ne veux pas de discours bien pensés ou pensants, je ne veux pas réfléchir pour mieux sauter. Je n'ai plus envie qu'on me dise où aller et quoi penser, que dire et qui priver. 

Bien sûr il y a des tas de gens qui ne pensent pas comme moi. Il y a des gens qui pensent qu'on peut frapper indéfiniment sans craindre la révolte. Mais peut-être que le temps de ces gens là est fini. Et peut-être est-ce le mien. 

Dire non c'est une stratégie plutôt inattendue pour ceux qui font régner la peur.

Je dis non. Je ne veux pas de la différence comme arme mais bien comme richesse. Je veux pouvoir aller où je veux et que d'autres viennent à moi. Je ne veux pas des mots qui blessent. Je veux des mots vrais. Je veux du respect. De la girafe à l'orque dansant. De l'étranger étrange à mon voisin. 

Tu me trouves simplette, facile et tu ricanes. Et c'est bien pour ça que je ne regrette pas ce non. Parce que j'ai d'abord eu peur de ce qu'on en dirait, qu'on me me trouve simplette et facile. Ce n'est pas grave, je suis naïve et pétrie de bons sentiments. 

Je ne prône ni l'anarchie ni un Revival. Je ne suis personne pour obliger l'autre à me suivre. Et je ne suis personne pour décider que l'autre n'a pas sa place ici ou là. Sauf peut-être pour les grands méchants loups. A ceux là je peux tourner le dos. Et leur dire encore et encore, non. 

Mais. 

Je ne suis personne si je suis la seule. 

Dis le avec moi.

Loup, es-tu là? 
Loup, je n'ai pas peur de toi. 

Non.

vendredi 16 janvier 2015

ceci n'est pas un débat

Pour une mouette qui ne cesse de rire avec moi

S'il y a un truc que je n'aime pas (trop souvent) faire sur mon coin de la toile c'est de réagir à l'actualité brûlante. Alors après le drame de "Charlie Hebdo" je me suis dit que je n'écrirais pas là-dessus. Non, je ne vais pas parler de Charlie Hebdo ici. Mais si tu es curieux je peux te raconter mes anecdotes sur ma relation avec Charlie et pourquoi je suis triste, ailleurs, une autre fois. Il y a des tas de gens qui écrivent sur Charlie, même si cette fois je n'ajouterai pas "beaucoup mieux que moi". Je ne le fais pas parce que ce n'est pas ce qui m'agite. Bon si ça m'agite en vrai mais ce n'est pas l'histoire que j'ai envie de conter. Cette histoire est celle  qui me tient éveillée la nuit et me donne parfois envie de pleurer sur le chemin du boulot (mon mec dit que ce sont les musiques déprimantes de mon iPhone, le doute est permis).

J'ai lu comme tout le monde la pléthore d'articles d'opinions, d'analyses, de critiques et de soutiens. J'en ai trouvé de fort intéressants que je me suis permis de partager via le réseau social. Je n'ai pas tranché ma position c'est vrai. J'ai trouvé que certaines critiques de Charlie avaient une place dans la réflexion tout comme les réflexions sur les racines socio-économiques amenant des jeunes, aujourd'hui adultes, à devenir des fanatiques meurtriers. Oui, je partage aussi l'idée que les politiques nationales et internationales ont une part de responsabilité. Le débat ouvert par ces meurtres est large et les angles d'analyse multiples. Je ne me cantonne pas aux appartenances religieuses, je parle aussi des classes sociales et des orientations philosophiques ou d'autres encore. La liste est longue. Oui bien sûr les communautés se sentent visées, les juifs, les musulmans et puis les libres penseurs qui défendent la liberté d'expression. Et aucune de ces communautés n'a vraiment tort (indice : si je faisais un débat ce serait un élément de réponse).

Là où le bât blesse, c'est que si l'échange est parfois resté stérile il a aussi parfois méchamment dérapé. Ce débat était entre amis et j'ai dû lire des choses qui m'ont atteinte au coeur. Parce que voyez-vous, je suis un peu antisémite semble-t-il. Un peu islamophobe. Un peu conne. Un peu trop engagée. Un peu trop à gauche. Un peu méchante. Un peu aveugle. Un peu intolérante. Un peu injuste. Bon. Moi je me sens  surtout énormément, profondément, durablement blessée et touchée dans mes convictions les plus intimes.  

Moi je croyais que les gens qui m'entouraient étaient avant tout des amis. Mais voilà depuis quelques jours je prends conscience que je ne suis pas juive, je ne suis pas musulmane, je ne suis pas française ni arabe, je ne suis pas croyante. Je croyais que j'étais Charlie, avec des tas de Charlie comme moi. Mais non. Je suis peut-être l'amie mais pas tout le temps, pas en temps de crise. Là, chacun rentre dans sa petite case. Les portes claquent, les amis FB sont supprimés, les articles et les commentaires effacés. Et je reste toute seule avec ce profond désir de dire et redire que nous sommes tous frères. Que les croyances n'importent pas, ni la couleur ni l'origine. Je suis Charlie mais je suis aussi naïve dirait mon mec.

Alors en lieu et place d'arriver à faire entendre mon insignifiante voix, de faire entendre qu'il faut refuser les stigmatisations et le jeu politique, qu'il faut refuser de fermer nos portes et nos coeurs, j'ai passé un temps infini à écrire une longue liste des "non je...". Je ne sais plus ce que je veux dire parce que je ne suis finalement jamais arrivée à le dire. Je me suis fait tirer dessus de toutes parts (symboliquement, j'ai eu de la chance). Je crois que c'était un truc du genre "je ne partage pas vos croyances mais je les respecte, tâchez de faire de même avec ma liberté et mes valeurs" ou "je partage vos peurs mais je ne veux pas nourrir la psychose ambiante, terreau fertile aux abus". "Je veux comprendre". Je n'ai jamais voulu convaincre ceux qui m'entouraient du bien fondé de ma position mais plutôt tenter d'offrir des pistes de dialogues. On ne peut réclamer le droit de se faire respecter si on ne laisse pas ce droit à l'autre. Enfin comme on dit, ma liberté s'arrête... et tout ça quoi. Une nouvelle fois j'ai goûté à l'amertume de ne pas faire partie d'une communauté, d'une religion, d'une case prédéfinie. Moi je trouvais ça pourtant formidable d'être libre.

On ne sera pas sous le feu nourri des kalachnikovs ni des médias en continu et ces amis redeviendront mes interlocuteurs du quotidien mais la trace reste. La tache. Ce moment où j'ai entrevu que les liens ne résistent souvent pas à la peur et au communautarisme de tous poils. Je peux sans doute aimer tout le monde mais tout le monde ne veut pas de mon amour inconditionnel. Et beaucoup me demande de choisir. Pas en ces termes bien sûr, en voulant plutôt me faire entendre raison, à tout prix. Et j'entends et je lis. Et je tente de comprendre, de faire du lien et mettre du sens, pour eux et pour moi.

Mais je ne choisis pas. Mon coeur est fidèle à mes principes. Je continue d'aimer et de militer, même si mes positions m'opposent parfois à certains qui seront aussi ceux que je voudrai protéger demain. Je ne veux pas choisir. Choisir c'est renoncer. Je m'y refuse parce que je crois en un idéal d'égalité et de fraternité. Certains diront que c'est une utopie, moi je dis que sans projet on ne va nul part. Refuser de participer à l'érosion de l'union c'est un début.
 
Bon demain je vais m'acheter un grand drap de lit blanc et une paire de sandales. Ou alors je m'isole sur une île pendant 27 ans et quand je reviens je tends la main à ceux qui m'ont offensée (j'ai pas dit pardonner hein). Je vais pas me voiler la face, je ne suis ni Gandhi ni Mandela. Est-ce que je peux encore dire que je suis Charlie? Charlie il se cherche. Et quelqu'un m'a dit (non pas Carla) que se chercher, se trouver, se connaître c'est le travail d'une vie. Je me demande pourquoi il y a tant de chômeurs alors.

vendredi 17 janvier 2014

Malaise

Chers et chères Ministres,
Chers et chères concitoyens, concitoyennes,
Amis lecteurs,
Sombres inconnus,

Permettez que je prenne quelques lignes pour faire la donneuse de leçon, la travailleuse en colère et me payer le luxe d'une petite carte blanche toute personnelle. Je vais une fois de plus parler d'enfants, non des miens, mais ceux des autres. Peut-être le vôtre, celui d'une de vos connaissances, très certainement un enfant de notre société. Une société fort peu maternante et contenante. Serait-ce même poussif de dire une société maltraitante? Et si tel est le cas, nos politiques en sont les complices voire les responsables. Et font de moi une complice tout autant qu'eux en m'obligeant à exercer mon travail dans ces conditions.

Je l'aurais bien écrit sur le ton à Florence Forresti celui-ci (vous pensez bien que dans le social il y a matière à rire) mais parfois l'heure est grave. Et le cri désespéré.

Il m'arrive de lire les commentaires en dessous des articles de presse sur le net qui concernent mon secteur professionnel (je sais, c'est bête). Une fois la rage et la colère passées, je me sens terriblement triste de constater que ces commentaires stupides et parfois violents sont avant tout le reflet d'une méconnaissance complète du secteur de l'Aide à la Jeunesse et de ses arcanes. Difficile de jeter la pierre au quidam de service quand on peut se demander si la ministre en charge (celle-ci ou les précédentes à vrai dire) sait elle-même de quoi il s'agit. Un petit tour pour mourir moins bête?

Les Services d'Aide à la Jeunesse s'adressent aux nouveaux-nés, aux bébés, aux enfants, aux adolescents et à leurs parents, responsables premiers de ces chères petites têtes blondes, brunes, crépues, rasées, sales, pleines de poux ou fleurant bon les bonbons. Ces enfants et leurs familles traversent des difficultés plus ou moins graves voire sont en danger. Notre rôle est d'évaluer, orienter et coordonner l'aide vers les services ad-hoc. C'est une aide spécialisée ce qui signifie que cette intervention se fait lorsque les services de premières lignes ont échoué à répondre à ces drames du quotidien. Nous soutenons, encourageons, négocions cette aide parce que nous travaillons dans la collaboration. Point n'est question ici de forcer une aide dont les gens ne voudraient pas ou n'en comprendraient pas le sens. Il peut arriver qu'une situation de danger grave et imminent ne trouve pas d'issue favorable dans ce cadre. Le Tribunal de la Jeunesse et le SPJ peuvent alors prendre le relais à leur manière, par la contrainte, ce qui n'exclut en rien le dialogue. Cela peut être salutaire comme cela peut être un échec.

Pourquoi? Parce que le public, les gens, les familles ET les travailleurs sont humains. Aucun système n'est infaillible quand il touche à l'humain, notre nature est faite ainsi. Autrement dit les enfants battus peuvent être loyaux, les parents présentant des pathologies psychiatriques ne sont pas toujours dans la réalité du système qui les interpelle, que les priorités de la survie font parfois l'impasse sur l'éducation, le bon sens (mais pas le sens pratique) et entraînent ces personnes fragilisées vers des routes improbables à nos yeux. Il n'est jamais possible de prévoir les actes des uns et des autres. Nous pouvons anticiper mais cela reste de l'ordre de la supposition et de l'espoir. De l'ordre de la confiance aussi. Et dans la vraie vie il arrive qu'un enfant meurt à peine quelques heures après avoir été vu par son délégué. Et cela même quand toutes les procédures sont respectées et les dossiers à jour. Non, on ne peut pas retirer tous les enfants à leurs parents imparfaits au nom du principe de précaution. Et même si nous le pouvions, nous n'aurions pas les moyens de les prendre en charge (restons logiques à défaut d'être censés). Est-ce là la société que nous souhaitons? Un contrôle absolu de l'individu? Il faut accepter ce fait (ce n'est pas une idée mais une réalité): le risque zéro n'existe pas. Ce qui peut être changé ce sont les moyens octroyés aux services d'aide. De véritables aides comme des outils de travail, des équipes plus nombreuses, des places d'accueil, des réponses administratives moins lentes et pointilleuses, des remplacements. Pas en surnombre - nous ne sommes pas exigeants à ce point là - parce que notre aide n'a pas comme sens de colmater la brèche hémorragique. Enfin, ne devrait pas. Notre travail au quotidien dépasse très largement les compétences pour lesquelles nous prenons fonction. Nous courrons au delà de nos terres et suppléons au delà du suppléable.

Aujourd'hui les équipes sont fatiguées de travailler avec des sparadraps qui, vous vous en douterez, n'ont que peu d'effet sur l'hémorragie décrite plus haut. Elles sont fatiguées de travailler parfois sans aucune protection de loi ni de soi-même. Même en faisant l'impasse sur nos bobos personnels (burn out, turn over, remplacements qui n'arrivent jamais, ...) nous sommes parfois pris dans de ridicules questions pratico-pratiques. La réalité du terrain c'est bête à dire mais parfois c'est une imprimante pour vingt-cinq intervenants, pas de répondeur téléphonique, des difficultés pour obtenir un agenda, c'est le manque de feuilles pour écrire, le manque de papier dans les toilettes, c'est un ascenseur sur trois pour cinq étages. Ça et tout le reste. Les travailleurs sont eux-mêmes dans une situation précaire. Et malgré tout, mes collègues font un travail formidable, admirable et trouvent parfois des solutions inattendues mais des "solutions" parce qu'il n'est pas question de laisser tomber.

Vous aurez peut-être entendu parler de la grève de ce 17 janvier 2014. C'est une action un peu désorganisée dans son démarrage mais qui fait suite à l'intrusion (une nouvelle fois) dans notre monde de celui du judiciaire. Non pas que nous soyons au dessus des lois et si manquements il y a, ils doivent être mis en lumière. Ces irruptions ne sont sans doute pas nouvelles mais elles ont cette tendance à devenir de plus en plus récurrentes. Et elles laissent dans la bouche du travailleur un goût amer. Cette impression qu'une société décadente et démissionnaire se cherche un coupable et que ce coupable c'est nous. Ne pas nous donner les moyens de mettre en place des aides respectueuses, nous raboter le peu de moyens que l'on a encore et puis se tourner vers nous quand il faut s'assurer que nous ne sommes pas les responsables des actes des jeunes et des familles que nous suivons, c'est trop. Trop is te veel.

Aujourd'hui on expulse, on privatise, on rogne les budgets de l'enseignement, de la culture, des allocations familiales, du chômage, on stigmatise. Nous créons une précarisation financière, sociale et intellectuelle. C'est une politique globale de repli sur soi qui refuse d'assumer ses responsabilités et qui nous lâche. Faut-il le rabâcher encore et encore mais les enfants d'aujourd'hui seront les adultes demain. Hypothéquer leur futur c'est hypothéquer le notre. Faire l'économie sur le dos des parents serait tout autant une erreur qu'il convient de ne pas minimiser. Être un parent qui n'a rien à offrir ou à perdre c'est être un parent qui n'a rien à transmettre. L'humiliation, le rejet et l'enfermement ne sont pas des réponses à la souffrance.

On est pas sympas parce qu'on fait grève. On sanctionne notre public déjà fragilisé. Certes. Mais c'est un paradoxe qu'il va falloir assumer. Comment offrir une aide valable sans de véritables moyens pour la mettre en place? Respecter notre public c'est aussi se battre pour lui. Et pour nous. Et puis pour vous aussi. Nous partageons cette société. Si notre cause vous indiffère, pensez à vous-même alors. Demandez-vous qui s'occupe de vos moches, vos dingues, vos maltraités, vos délinquants en devenir, vos enfants abusés. Ceux que les politiques abandonnent chaque jour un peu plus. Et nous avec.

mardi 10 décembre 2013

Madiba

Quand j'étais petite, j'ai hérité d'un tee-shirt. Il était déjà usé pour l'époque (on devait être début ou mi-80'), avec le contour de l'Afrique, colorée de jaune et vert avec des barreaux. Il y avait la tête d'un type un peu gros en travers et il était écrit "Free Mandela". J'ai porté ce tee-shirt de nombreuses années. Je me suis attirée de nombreux sourires en le portant. J'ai toujours adoré ce tee-shirt. Puis j'ai grandi, j'ai appris et je l'ai aimé encore plus. Le tee-shirt et l'homme.

Je me sens très affectée par son décès. J'ai cherché des mots pour partager ce sentiment mais ils m'échappent. C'est un peu confus. Et puis ce matin, en écoutant La Première j'ai su. En fait c'est Thomas Gunzig qui l'a su. Parce qu'à vouloir dire de belles choses c'est vrai qu'on s'emmêle les pinceaux et on fini par dire des conneries. Au plus simple, au plus efficace, car trop d'hommage tue l'hommage... (il ne faut pas avoir peur de cliquer, le lien ne mène pas à Robben Island).

Et pour ceux qui trouveront que cela manque de poésie, il restera toujours la lecture d'Invictus.

"Out of the night that covers me,
Black as the pit from pole to pole,
I thank whatever gods may be
For my unconquerable soul.

In the fell clutch of circumstance
I have not winced nor cried aloud.
Under the bludgeonings of chance
My head is bloody but unbowed.

Beyond this place of wrath and tears
Looms but the Horror of the shade.
And yet the menace of the years
Finds and shall find me unafraid.

It matters not how strait the gate,
How charged with punishments the scroll,
I am the master of my fate:
I am the captain of my soul".

William Ernest Henley







mercredi 20 novembre 2013

Image

France 2 un mardi soir, je regarde cette émission sur les nazis. Illustrations d'archives parfois peu connues. C'est une scène en noir et blanc avec ce drôle de rythme des images d'un autre temps. 30 secondes. Campagne un peu boisée, camp et barbelés. Une mère qu'on sépare de force de son enfant. Elle lui tourne le dos, il court derrière elle. Il est petit, 4 ou 5 ans. Elle se tourne vers lui, elle le repousse, le soldat la repousse. Elle s'éloigne à nouveau de son enfant et repart vers le groupe de femmes qui attend. L'enfant court vers elle. Coup de fusil, l'enfant tombe à plat ventre. Il est mort.

Elle avait l'air si froide cette mère en tournant le dos à son enfant. On ne voit pas son visage, on n'entend pas ses pensées ni battre son coeur. Il avait l'air si petit et si perdu ce garçon, courant derrière elle. On n'entend pas ses cris. Et ce soldait qui paraît immense. Ca m'a flingué ma soirée. 

jeudi 14 novembre 2013

Ces gens là / Bonjour misère

Quand il arrive à mes parents de parler de mon travail, il arrive souvent qu'on leur dise: "quel travail difficile, quel courage!". Alors j'ai envie de répondre : "merci" (c'est mon métier, je suis payée pour). Quand il arrive à mes parents de parler de mon travail, il arrive souvent qu'on leur dise: "rien ne l'oblige à porter la misère du monde". Alors j'ai envie de répondre: "non, c'est vrai mais il faut bien que quelqu'un le fasse" (c'est mon métier, je suis - mal - payée pour). Et puis j'ajouterais bien que je ne le ferai pas toute ma vie non plus. Il ne faut pas se mentir, le social ça use.  

C'est vrai quoi, la misère du monde "c'est moche" comme dirait mon aînée. La misère a ça de certain, elle ne va pas en s'améliorant. Et la foi en l'être humain non plus. Si la misère a la noirceur d'un Ken Loach, elle n'en a pas sa poésie. Les gens pauvres, les gens malheureux, les gens maltraitants ne sont pas plus touchants que les autres. Ces gens là madame ils sont comme tout le monde, sauf qu'ils sont dans mon bureau. Ces gens là ne sentent pas bons, parfois même ils puent. Ces gens là ne comprennent rien à ce qu'on leur dit et n'en font qu'à leur tête, jusqu'au moment où il faudra briser leur coeur pour les aider. Ces gens là ne vous écoutent pas, ils savent. Ces gens là ont des tas de maladies et parfois c'est vraiment pénible de leur serrer la main. Ces gens là sont parfois bêtes, parfois tragiques et parfois pathétiques. C'est parfois difficile de démêler la misère sociale de la misère intellectuelle. Parfois ce n'est pas possible et c'est évident de pourquoi. 

Je ne suis pas indifférente, je me protège.

Quand les gens (les autres, dit fonctionnels) se demandent comment on peut faire ce métier, ce qui me vient à l'esprit c'est que je ne sais pas. Je me poserais plutôt la question de savoir comment font tant de gens pour tourner le dos à la misère et s'endormir paisiblement. Ce qui est sûr c'est qu'un travailleur social ça ne manque pas d'humour ni de second degré. Ça ne manque pas de recul non plus.

L'horreur (qui fait frissonner les bonnes gens) n'est pas toujours là où l'on imagine et sa gradation est surprenante. Se taire quand on a envie de hurler, avoir envie de partir en courant avec les bébés, de sauver les familles du système qui s'apprête à les broyer (et savoir que nous en sommes les premiers rouages), douter, être lassé par les situations qui se répètent, les familles qui se déchirent, les enfants placés, en faire trop ou pas assez et cette mauvaise foi crasse (est-ce vraiment ça?). Mentir, toujours mentir parce que les solutions existent mais qu'elles ne sont pas à disposition. Et puis parce que travailler avec l'être humain rend ce travail incertain du début à la fin. Ça s'appelle l'insécurité. Et à tout moment on peut être poursuivi pour ne pas avoir fait ce qu'il faut. Oui mais, on ne peut pas imposer aux gens de faire ce que l'on veut. Ça s'appelle le paradoxe de la collaboration. 

Alors non, je ne suis pas obligée de le faire ce métier. Et au-delà des considérations matérielles - gagner ha! sa vie - il faut bien que quelqu'un se préoccupe de ces gens là. Je peux arrêter demain et ils seront toujours là. Je peux continuer encore longtemps et il y aura tous ceux que je ne connaîtrai pas et que je n'aiderai pas. Je ne sauverai pas le monde mais est-ce pour ça que je ne dois pas y contribuer? Là maintenant, il y a ceux avec qui je travaille et si une de mes actions peut porter ses fruits alors je pourrai dormir un peu plus tranquille. Dans un monde égoïste. Moi.

dimanche 13 janvier 2013

Moi, pas lesbienne, pas mariée, 2 enfants. Et tout le monde s'en fout.

Si j'étais homo à Paris aujourd'hui, cette après-midi, j'aurais vraiment le moral dans les chaussettes. Tous ces gens "pas homophobes mais..." ... mais qui se mobilisent pour que surtout je n'aie pas accès au même droit que tous, ça me foutrait vraiment mal. Tant de haine déguisée au nom du bien pensant.

C'est pas que je sois de gauche ou particulièrement tolérante, c'est pas que les gays soient tous mes amis, c'est pas que je vive dans un monde imaginaire. C'est juste que franchement si je devais me geler les couilles que je n'ai pas un dimanche comme ça, je choisirais de me mobiliser pour une vraie raison. "Non au mariage pour tous". Allez dit, c'est quoi c'te cause.


© Brian Hudok
Et pourquoi t'es contre d'abord? Pas parce qu'ils sont homos tous ces homos mais un peu quand même hein! T'as rien contre eux mais quand même hein! Mais juste entre nous, comme ça, qu'est-ce que ça peut te foutre? En Belgique, ça fait dix ans que les couples de même sexe peuvent se marier et pour autant que je sache, ça n'a strictement rien changé à notre vie. Certainement beaucoup pour ces couples qui désiraient se marier mais à nos gentilles et tranquilles petites vies d'hétéros ça n'a rien changé. Et si ça se trouve, il y a même des gens qui ne sont pas au courant que c'est possible, c'est dire comme ce droit pour tous est simplement un droit pour tous, dans une société qui se veut égalitaire.

Et puis quoi avec cette PMA? Non pas pour les homos? "C'est pas la norme les homos...", "naturellement ils ne savent pas concevoir...". Oui c'est vrai, malgré tout l'enthousiasme du monde et des heures d'ébats amoureux, deux hommes ou deux femmes ne sauront jamais faire un enfant sans intervention extérieure. Alors pas de PMA pour eux? Et bien sûr on dit pas ça parce qu'on est homophobe hein! Non, il n'y a pas de mal (quand on est con, on est con). Je te dirais juste que si tu veux appliquer l'argument de type "nature" alors la PMA jette-la à la poubelle "pour tous" (un peu comme le mariage). Ben oui c'est vrai quoi, tous ces couples hétéro qui ne savent pas procréer par eux-mêmes, dans le fond, c'est la nature qui veut ça. Alors faut pas forcer la nature. Pas de mariage pour tous, pas de PMA pour tous, pas de bras, pas de chocolat. Faut être juste dans la vie. Ca c'est une vérité criante. Le mariage est une institution humaine, qui dès lors peut être modifiée tandis que la procréation est une fonction naturelle. Pas de bol pour les hétéros, c'est sur la PMA qu'il faudrait tirer à vue en premier...

Ou peut-être qu'il faut se dire que dans le fond tu défends pas vraiment tes droits quand tu vas manifester comme un con par -2° à Paris, parce que donner des droits à plus de gens ce n'est absolument pas te priver des tiens. Non non, il te faudra être honnête, quand tu vas manifester c'est quand même un peu parce que les homos ils te dérangent et que c'est l'occasion de le dire sans le dire vraiment. Dire que deux hommes qui couchent ensemble (ou deux femmes mais toujours un peu moins) ça te dérange. C'est sale, c'est pas comme toi... C'est sûr c'est pas comme toi, mais quand je te vois militant à la con, je me dis que les homos ont bien de la chance de pas être comme toi.

On va pas tomber dans le piège de définir les "bons homos" en comparaison aux "mauvais hétéros" (ceux qui divorcent ou qui maltraitent leurs enfants). Faut pas se définir par la négative. Il faut être fier de ce qu'on est. Et aux dernières nouvelles, les gays, lesbiennes, sont des hommes et des femmes tout comme nous, sauf, oui sauf, qu'ils n'ont pas le même objet d'amour (ou de désir) - ou justement si - que nous. Bref, on en revient toujours à ce qu'ils fabriquent dans leurs plumards. Mais ça suffit ce voyeurisme d'hétéro. Perso je n'aimerais pas que des gens passent autant de temps à se chiffonner le bulbe en se questionnant sur ce qu'il se passe sous ma couette.

Oui bien sûr, il y a des catégories à risques, des comportements plus à risques et patati et patata mais franchement si t'es là comme homo à demander le droit à te marier et te fourguer des mioches dans les pattes, c'est sans doute que t'es pas la drag queen de l'année et que malgré tout t'es un brin conformiste. Regarde moi, le mariage ça fait 13 ans que je m'en passe avec mon mec. Mais bon, c'est ça un droit pour tous, tu l'as et t'es pas obligé de l'utiliser.

Il est temps de te résoudre à cette vérité qui te semble si dure à avaler, les homos sont des êtres humains comme les autres, mis au monde par des hétéros, qui ont les mêmes désirs que les hétéros parce qu'ils grandissent dans une société d'hétéros. Tu ne remets pas les droits des noirs en question parce qu'ils sont noirs (je te rappelle que "noir" c'est juste une pigmentation différente de la tienne) alors pourquoi tu le ferais pour quelqu'un qui n'aime pas comme toi? A moins que dans le fond, t'aimes pas les noirs non plus. A moins que dans le fond ce soit la différence qui te fait peur. Et que dans ton ignorance tu préfères te draper dans les convenances.

Je conclus. Mariage pour tous, PMA pour tous. Parce qu'il n'y pas de demi-mesure possible puisqu'il n'existe pas de demi-hommes. Et parce que des familles homoparentales il y en a des milliers qui courent les rues et que de leur donner un réel statut ce serait rendre un fier service aux enfants, leur donner une existence légale, respectueuse de leur réalité. Ca n'empêche en rien de questionner, d'observer et d'accompagner ces familles. Mais ça franchement c'est pas neuf comme conclusion, c'était déjà celle que je posais comme étudiante dans mon mémoire de fin d'études en 2002. C'est dire comme - à mes yeux - cette manifestation est à la bourre.

Allez dit, rentre chez toi, tu me fais honte.

mercredi 9 janvier 2013

Wishlist (ou les soldes de Petit Papa Noël)

Cher Petit Papa Noël,

J'ai pas mis le paquet cette année en faisant ma liste, plus préoccupée par la liste de l'elfe et de la grenouille. Si je suis plutôt contente au finish de ne pas avoir eu une orgie de cadeaux mais plutôt des présents de bons goûts qui m'ont réellement fait plaisir, j'ai quand même envie de rajouter deux ou trois petits trucs, au cas où à l'occasion des soldes, tu te dirais que tu peux encore me faire plaisir.
En 2013,
- j'aimerais ne plus entendre parler de Depardieu, autant parce que je me fous de lui que parce qu'il me fout en rote. Être un monstre sacré n'autorise pas toutes les audaces ni toutes les conneries. Et parfois fermer sa gueule c'est bien aussi. Quand on ne sait pas ce que veut dire démocratie, on se fait discret.
- ps: n'hésite pas à faire taire tous les autres acteurs sur le même sujet, qu'ils soient pour ou contre, ils gagnent quand même un peu trop à mon goût, surtout en temps de crise.
- dans le même ordre d'idée, si tu veux verser des millions sur mon compte en banque je serai ravie de les avoir même si je dois en passer par payer des impôts pour cela. Au vu de ce qu'on me taxe maintenant sur le peu que je gagne, je suis drillée et je pourrai survivre à la richesse.
- comme chaque année, je sais que j'insiste, mais pourrais-tu me dire pourquoi on tolère d'Israël ce que l'on ne tolérerait d'aucune autre nation au monde?
- j'aimerais que l'on prenne enfin la mesure de ce que c'est d'être un non croyant, un athée ou libre penseur dans un monde où tout semble gouverné par la pensée religieuse (là où ce n'est pas l'économie qui sévit) et où la bêtise humaine semble y trouver sa justification. Voeu pieu s'il en est, j'aimerais que les croyants foutent la paix aux non croyants comme nous leurs foutons la paix et qu'ils cessent au nom de leur religion d'amour de faire la guerre. Ou, pourquoi pas, qu'il soit possible de communiquer ensemble? A tout hasard je te mets le lien vers cet article fort intéressant, The blessings of Atheism, qui pourra peut-être t'aider à comprendre pourquoi comme le dit si bien l'auteure de ce texte, "nous souhaitons que nos concitoyens puissent respecter notre conviction profonde que l'absence d'un au-delà prête à une plus grande, et non à une moindre, importance morale à nos actions sur terre".
- comme tu ne peux pas faire que les morts ne le soient plus, j'aimerais juste que cette année me soit donnée pour accepter leur absence et avec le temps la supporter.
- je souhaiterais un peu moins de scrupules chez les grands de ce monde quand il s'agit de prendre de véritables décisions ou des sanctions, que ce soit pour nous sortir de la crise ou pour éviter des drames. Le même manque de scrupules au moins qu'ils semblent avoir quand il s'agit de nous la mettre bien profond ou de fermer les yeux sur deux ou trois trucs (cela s'applique tant à l'économie politique qu'à la politique internationale ou nationale). Je sais que ce ne sera pas facile parce qu'il faudra d'abord identifier qui sont les grands de ce monde et là il y a parfois une confusion entre eux et les décideurs.
- clarifier un brin les saisons. Oui parce que la pluie à Noël, la neige en novembre, ... Cela devient difficile de faire le tri entre la garde robe d'été et celle d'hiver.
- j'aimerais que les gens soient un peu plus eux-mêmes, non pas parce qu'ils sont bien mais parce que l'hypocrisie c'est un peu éreintant à supporter sur le long terme. Pas la peine de faire le généreux quand on ne l'est pas (surtout en période de fêtes, que ce soit avec les pauvres SDF dont ils se foutent le reste de l'année ou avec des cadeaux qui ressemblent parfois beaucoup à de la charité). Pas la peine de jouer la carte de la tolérance quand sur le fond on pense que "les étrangers seraient quand même mieux chez eux" (ah c'était pas ici?) et que "les pédés 'y sont sympas mais faudrait pas leurs accorder les mêmes droits qu'aux autres, 'y sont pas nos égaux non plus" (ah non?). Et puis il y a le statut de la femme, arrêtons de faire comme si les inégalités n'existaient plus en occident - région hautement civilisée c'est bien connu - et puis de donner des leçons aux autres sur le sujet. Je ne comprendrai jamais pourquoi les gens essaient de se faire passer comme tolérants alors que toutes leurs actions vont à l'opposé. Quelle dépense d'énergie inutile. La tolérance est bien moins fatigante, il y a tout à apprendre de l'autre juste en le laissant être.
- je ne souhaite pas que des choses impossibles bien sûr. Tu pourrais par exemple mettre fin aux longues chaînes sur Facebook de "si tu penses que..." ou "j'expose ma vie sur la toile mais je veux la garder privée alors cliques "like" sur mon profil". Non, en fait ça c'est peut-être impossible. Bon alors tu pourrais toujours distribuer dans chaque cheminée - avec les cadeaux - un prospectus avec la définition du mot "HOAX"?
- c'est un peu égoïste, je le conçois, mais d'ici mars pourrais-tu t'arranger pour que le service de la STIB soit à la hauteur des prix pratiqués? J'aimerais apaiser mon ulcère quotidien (et je suis persuadée que ma mère sera ravie que je cesse mes plaintes constantes sur le sujet... - qui peuvent parfois la faire rire mais lui font sciemment éviter la ligne du 95 aux mêmes heures que moi).
- Tout bête aussi mais n'hésite pas à distribuer un prospectus reprenant la définition de la civilité et de la courtoisie. Je ne voudrais pas en arriver à dire des choses comme "il fait bon vivre en Suède" mais tout de même, quand la population comprend le sens de la règle et dès lors l'applique, il y a comme un air de confort au quotidien. Contente toi d'une explication hein (!) parce que je ne voudrais pas finir avec une interdiction de mettre la fessée non plus (comprends moi bien).
- une fois pour toutes, veux-tu bien bannir la fourrure (et toutes les autres matières animales) de l'industrie du vêtement? A l'air du gore-tex et du latex c'est vraiment primaire. Ou alors, pour satisfaire mes besoins sadiques, suggère aux vieilles peaux et jeunes mannequins de se faire écorcher vives un doigt, histoire qu'elles assument en âme et conscience ce qu'elles ont sur le dos.
- enchaîne avec la maltraitance animale dans sa globalité, tant que tu y es, que tu peux simplement bannir (non et non et non, les animaux ne sont pas à notre disposition, ils font juste - malheureusement pour eux - partie du même écosystème que nous). Peut-être que l'homme une fois capable de s'occuper de la flore et de la faune deviendra capable de se responsabiliser pour lui-même? (un peu comme pour les post-cures où l'on suggère de commencer par prendre soin d'une plante verte, si elle survit on peut prendre un animal et s'il survit on peut envisager une relation avec un humain).
- et il y  a aussi les droits de l'homme, l'économie, les richesses mal réparties, la consommation raisonnable, une certaine forme de psychose mondialisée, (...) et tout le reste.

En fait je me rends compte que je souhaite beaucoup de choses quand même. Disons alors que je souhaite continuer à vivre avec des valeurs humanistes, les partager et peut-être convaincre d'autres de se mobiliser, que ce soit pour la protection animale, la préservation de notre biotope ou le droit de chacun à vivre en sécurité et dans le respect de ses convictions. Convaincre que seul on ne peut rien changer mais que si chacun fait un pas, c'est une force colossale qui se met en marche.

Vivre et laisser vivre.

Merci,
Une petite fille sage.



jeudi 20 décembre 2012

Apocalypse

Meeeerdeuh, demain c'est la fin du monde et je suis pas prête. Cette procrastination me tuera.


© Hergé "L'étoile mystérieuse"
Je n'ai pas eu le temps de refaire ma couleur (quitte à partir autant le faire avec classe), j'ai oublié de téléphoner au contrôle technique, je n'ai pas eu le temps de retrouver une jolie taille 38 (mais où l'ai-je donc rangée?), ma dernière petite folie shopping online n'a pas encore été livrée, je n'ai pas nettoyé mon frigo ni terminé de télécharger la saison 9 de Grey's anatomy et EN PLUS j'ai déjà fait mes achats de Noël - j'étais manifestement distraite ce jour là. Le point positif, le chat a son détartrage aujourd'hui, il sera donc à même de chasser avec l'haleine fraîche et les gencives clean dans le monde post apocalyptique. 

Mais que faire de ces dernières heures? Dilemme ô dilemme! 

Ne serait-ce pas l'occasion de partager tous ces sentiments trop longtemps contenus au nom du politiquement correct et de la paix des ménages? L'occasion de partager un flot de petites vérités toutes personnelles extrêmement soulageantes à dire et très certainement moins à recevoir. Pouvoir commenter certains statuts FB en toute franchise. Prendre une dernière fois le 95 et "mettre de l'ordre" dans le foutoir organisationnel que m'impose la STIB. Ca me démange. Trop. Tsssssss, trop de colère et pas de certitudes des bénéfices à le faire. Si la fin du monde n'a pas lieu, je serai condamnée à me rendre au boulot à pied. Pire, en voiture.

Ou alors... je pourrais en profiter pour avouer deux ou trois petits brols. Comme le fait qu'il m'est brièvement arrivé d'aimer un morceau de David Guetta (brièvement je le jure) ou que je suis une fan inconditionnelle de Vin Diesel? Ou manger d'une traite les restes de Saint Nicolas et puis tous les autres restes aussi parce que rien ne sert d'économiser aujourd'hui ce qui sera perdu demain. Bof pour les restes, en cas de non destruction de la planète je m'expose à une crise de foie fort pénible (et à un régime deux fois plus strict pour compenser ces excès).

Je pourrais aussi (enfin?) faire des projets fous puisque je sais désormais que je n'aurai pas à les honorer et que personne ne sera là pour me le reprocher. Genre tout claquer pour partir élever des chèvres dans le Larzac, me lancer dans trois carrières différentes où je brillerais de mille feux en assumant mon rôle de mère de l'année, faire un régime et m'y tenir vraiment, faire du sport. Risqué, le programme va être chargé dès le 22 décembre pour les 9 vies qu'il me faudra pour mettre en oeuvre le tout. Je suis trop paresseuse pour une fin du monde.

Je pourrais aussi - il est vrai - faire l'effort suprême et reconnaître que je suis une gentille fille, dire à ceux que j'aime que je les aime justement. Mais ça je peux aussi le faire tous les jours de l'année, avec ou sans fin du monde. Il me reste les grandes déclarations sur l'éternelle amitié, la profondeur de mes sentiments pour certains et certaines (qui l'ignoreraient encore parce qu'il m'est déjà arrivé - à mon grand désespoir - de le faire pour m'entraîner en vue du 21). Mais pourquoi s'encombrer de sentiments éternels pour 24h seulement?

Ah non je sais, je vais remercier nos amis les Mayas qui ont permis que nous nous amusions un peu durant cette année 2012 à l'heure où la politique en mode drama queen et le populisme occupent une trop grande place dans ce qu'il faut malgré tout appeler de l'information (à chier mais information quand même). Les remercier de nous faire oublier les politiques hypocrites de l'ONU, les sacrifices financiers que l'on nous demande de faire quand d'autres se vautrent dans leurs richesses, nous faire oublier qu'il y a un certain paradoxe à pleurer 20 enfants morts dans le Connecticut quand la politique américaine en tue des milliers dans le monde, nous faire oublier que pour des tas de gens c'est tous les jours un peu la fin du monde, nous faire oublier que le système nous asservit et que nous sommes les premiers à lui donner les outils pour le faire. Et parce qu'on se fout de Michèle Martin, de Gérard Depardieu, de Kate Middelton et que ce serait sympa de ne pas nous prendre pour plus con qu'on est (restons modestes, on est toujours le con d'un autre).

Bon, comme toutes ces prédictions ne semblent pas fiables à 100% (ce sera quand même la énième fin du monde), je fais tout de même mon linge. Parce que je ne suis pas sûre que mon mec apprécie l'excuse "apocalypse" quand il devra aller bosser en short en plein hiver. J'aurai bien l'occasion de participer à une autre fin du monde. 


samedi 12 mai 2012

Sign & share

de l'art de s'engager - sur un mode moderne et virtuel. 

Les sarcastiques diront que c'est bien facile de cliquer derrière un écran pour se sentir actif. Ceux là sont ceux qui ne cliquent jamais et qui à part critiquer les agissements des autres ne font pas grand chose. En fait disons-le ils ne foutent rien d'utile. 

C'est vrai que l'engagement ce n'est pas obligatoire. Même si on peut se demander comment à notre époque il est encore admissible de rester impassible devant le rythme effréné du monde dans sa course à la connerie. Le retrait, le sans-avis, la pseudo prise de distance, la non position (différente de la réflexion ou de la difficulté à trouver la position qui nous parle) c'est une manière de ne rien faire. C'est une manière de laisser faire, parfois le pire. Et ça c'est irresponsable. 


Le temps pris pour lire les quelques lignes explicatives d'une pétition (pour ceux qui n'ont pas le courage de lire plus avant des articles de fonds) est court, il ne coûte rien et peut pourtant y faire beaucoup. Les adeptes de nombreux mouvements d'action sur la toile sauront qu'il y a des suites aux (sérieuses) pétitions. Bon pas toujours, c'est vrai, mais qui ne tente rien est sûr de ne rien avoir, pas vrai? Et à défaut de résultats concrets rien n'est perdu car c'est aussi une  manière de diffuser de l'information et d'en apprendre plus.  

Parfois quelques clics font plus que lorsqu'on marche en silence dans la rue. Je ne sais pas si c'est vraiment bien mais c'est un moyen. Et certains combats ou certaines idées valent bien de s'ouvrir à de nouvelles méthodes. 

Dans notre société où l'on veut toujours plus, les aficionados de la consommation se réjouiront que les pétitions on-line fourmillent des sujets les plus variés et rencontrent de nombreux intérêts (même si un grand nombre ne partage pas forcement chacun de ces intérêts et que toutes ne sont pas - bonnes - à signer). Chaque région du globe est couverte, des humains aux animaux en passant par les animaux utilisés par les humains et les humains utilisés par les humains. De l'écologie, du bio, du fair trade. De l'éducatif, de l'artistique. Des gays, des lesbiennes, des hétéros et des qui savent pas vraiment. Des guerres et des paix. Je ne suis pas exhaustive. Il y a donc toujours moyen de trouver clic à son doigt. 

Tout ça pour dire quoi? Et bien qu'à la prochaine pétition que je t'envoie, attends avant de nier l'affaire ou d'effacer mon message l'air de rien. Clique un coup ou deux et tu verras qu'il ne t'arrivera rien si ce n'est d'avoir bonne conscience. Un luxe aujourd'hui. Et puis diffuse (si tu as le temps). Fais partager tes idées, tes craintes, tes souhaits, tes passions aux autres. Ce sera toujours plus utile que la chaîne de l'amitié que tu ne peux briser sous peine de mourir dans d'atroces souffrances et avec laquelle tu brises par contre les c*** de tes contacts mails. Ce sera plus utile que de poster sur ton mur Facebook un avis disant que t'es fièr(e) de connaître un cancéreux, un moche, un handicapé et que TOI tu oses le dire. Ça leur fait une belle jambe tiens... Par contre les pétitions permettant de lutter contre la discrimination, pour permettre les soins accessibles à tous et j'en passe et des meilleures ça pourrait avoir un peu de sens pour tous ceux qui luttent face aux adversités physiques, sociales, politiques de la vie. Enfin je crois. 

Manifester même du bout des doigts est un droit que tous n'ont pas. C'est donc un devoir pour ceux qui l'ont. Il y a plus de force dans une pétition que dans un avis donné du fond de son canapé. Courage!

Le "clic" d'un jour ne dispense personne d'une petite manif live à l'occasion. Dis toi que c'est "vintage" s'il faut que ce soit un peu "lifestyle" pour te convaincre que l'engagement c'est pas ringard. 



vendredi 25 novembre 2011

Prise de risque



© photo Thierry Bingen - voyage en Palestine, novembre 2011.
...Now the sweet veils of mercy
drift through the evening trees
Young men on the corner
like scattered leaves
The boarded up windows
The hustlers and thieves
While my brother's down on his knees
My city of ruins
Come on rise up!
(Bruce Springsteen)


La première chose qui me vient à l'esprit en pensant au conflit Israëlo-Palestinien c'est qu'il est difficile d'en parler. Et que c'est le sujet qui va vous plomber une soirée (croyez moi, même entre amis, à moins que ces mêmes amis partagent presque inconditionnellement votre point de vue). La réponse la plus courante lorsque le sujet se profile est "tu sais c'est un sujet très complexe et je ne maîtrise pas toute l'histoire et les enjeux". Bouhou! C'est un sujet qui fait peur parce qu'il faut parler des juifs et des arabes. Des mots qui font peur parce qu'ils sont connotés, chargés de sens ou d'émotions. Et que la terreur d'être désigné comme antisémite nous fait taire (on se demande bien à quel titre d'ailleurs mais avouons le tout de même, en ces temps d'amalgame...).
Haut les coeurs! Il est temps de mettre des mots sans en avoir peur. Il est temps de parler. Comme beaucoup il est vrai que je n'ai pas une perception pointue du conflit sur le fond historique, je n'ai pas potassé des milliers de livres sur la question, je n'étais pas née en 1948, je ne suis ni juive, ni Israëlienne, ni arabe, ni Palestinienne. Mais je suis humaine, avec un fond d'humanité en moi (ce à quoi tous les humains ne peuvent prétendre...). Et à ce titre je suis en droit de parler des droits humains et de leurs bafouements. J'ai le droit de ne pas accepter de me taire face à l'Histoire qu'il faut respecter. L'histoire c'est l'affaire de tous et elle ne se conjugue pas qu'au passé. Aujourd'hui en Palestine il y a des personnes qui vivent dans un état de guerre. Certains l'ont choisi, d'autres pas. Certains boivent du champagne au bord de la plage, d'autres sont privés d'eau. Certains sont modérés, d'autres moins, il y a même des extrémistes. Il y a même des colons en territoire Palestinien. Oui. Ces colonies sont des violations systématiques des droits humains et ne peuvent pas vous laisser indifférents. Oui. Mais je suis en colère plus globalement sur la négation de la souffrance engendrée par cet état de fait dans lequel grandissent aujourd'hui des enfants dont on ne pourra rien attendre d'autre que de la colère et des représailles violentes si le déni persiste. Je ne peux croire que les enfants de Gaza, évoluant depuis leur naissance dans un état traumatique, puissent plier sous le poids de l'oppression sans révolte. Il y a pourtant - il faut le souligner- en Israël, et partout dans le monde, des personnes de bonnes volontés, de toutes les communautés, qui travaillent à un processus de paix. Plus ou moins loin des grands de ce monde, qui manifestement ont des priorités toutes particulières en terme de paix, il y a des travailleurs sociaux, des idéalistes, de fervents humanistes qui désirent ardemment cette paix, cette reconnaissance de l'autre dans sa richesse. Pendant ce temps là il y en a d'autres qui persistent et signent dans l'ignorance. Ces autres érigent des murs, humilient des hommes et des femmes, colonisent, privent d'eau et de logements des familles, détruisent un héritage. Ces autres attisent la haine et tentent de nier les droits, même l'existence, de ceux qui sont leurs frères. Sans doute ne peuvent-ils se reconnaître dans ce lien, trop acharnés à le détruire. Parler du conflit Israëlo-Palestinien ce n'est pas que parler d'histoire millénaire ni de celui qui était là avant l'autre (sinon peu de pays ou de peuples pourrait aujourd'hui s'arroger le droit de leur terre). Parler de ce conflit c'est avant tout parler d'un Etat de souffrance. La souffrance de ceux privés de beaucoup ou de tout, surtout privés de leur dignité. La souffrance aussi d'un groupe de personnes qui en opprime d'autres. Au nom de sa propre histoire? Ce serait le paradoxe absolu. Si la 2ème guerre mondiale devrait nous avoir appris une leçon c'est que la barbarie la plus absolue est possible et qu'il est de notre devoir de ne pas la laisser se reproduire. Le drame de la 2ème guerre mondiale n'appartient pas à une et une seule communauté parce que ce drame est de la responsabilité de tous. Et aujourd'hui il en va de même quant à cette responsabilité - commune - de refuser le déni d'un peuple par un autre. Au passage nous noterons, par une petite digression, le Tibet oublié qui devrait faire l'objet d'une chronique à lui tout seul. En termes de négation de la culture, de la religion, des croyances et des traditions de l'autre, il y a là un grand gagnant! Mais bon, le Tibet, c'est vraiment très loin de chez nous, très haut et les enjeux économiques y sont mineurs pour le moment. En plus ils sont non violents... Passons. Revenons à la prise de risque du jour. Moi ça ne me gêne pas de dire que les colons sont des irresponsables, des criminels, qui vont au devant de problèmes et qui n'obtiendront aucune compassion de ma part. Mais dans ma grande bonté (dont ils se contre foutent royalement) je me désole secrètement pour eux et tout ce qu'ils manquent en refusant d'être ouverts à l'autre. Tout ce qu'ils détruisent aussi. Alors, j'ai tort de parler du conflit Israëlo-Palestinien parce que je ne suis pas une spécialiste de la "question"? De parler d'une histoire d'hommes guidés par des peurs et par de l'ignorance? C'est finalement l'histoire de tous les conflits. Celui-ci n'est pas différent des autres. Refuser d'en parler c'est rejoindre le camp de l'ignorance et de la peur. Il y a d'autres chemins possibles. La paix est l'affaire de tous.

Pour ceux qui dansent d'un pied sur l'autre, hésitant encore à prendre une position, à ce sujet mais sur d'autres aussi, à s'engager dans la voix de l'opinion (la mienne ou une autre, je ne suis pas sectaire), je ne peux que vous inviter à lire Stéphane Hessel et pourquoi pas "Indignez-vous"...



mercredi 16 novembre 2011

Le coeur flingué

©Chloé Bingen
Aujourd'hui j'ai fermé les yeux sur un enfant. Pas le mien. Un de mes "dossiers" comme on les appelle. Un dossier parmi des milliers, une petite fille parmi beaucoup d'autres. J'ai fermé les yeux parce que je n'ai pas pu aller plus loin. Il n'y a pas de croustillant à lire ici (si tu cherches des faits divers spectaculaires lecteur, il y a toujours RTL ou 7 sur7). C'est juste une triste histoire, d'une maman sans papiers et de sa petite fille dont elle est séparée. Une petite fille qui souffre parce qu'il a fallut la protéger et qu'il n'y avait pas de place pour sa maman. Parce que cette petite fille elle a un toit mais pas sa mère. Il y en a beaucoup de ces enfants arrachés à leurs parents faute de solutions pour tous. C'est une histoire banale celle des familles éclatées. Je n'ai pas pu aller plus loin et je me fiche des raisons bonnes et mauvaises. Tout ce que j'ai entendu c'est qu'une nuit de plus cette enfant serait séparée de sa mère et qu'elle a mal. Qu'au nom de l'aide matérielle que je lui apporte, je la prive de l'affection qu'elle réclame à corps et à cris. Qu'elle serait sans doute bien plus sereine dans les bras de sa mère mais que ces bras ne la protégeront pas du froid quand elles seront sous un pont la nuit. Il n'y a pas de solution idéale. Ni pour elles, ni pour moi.
J'en ai des masses des histoires d'enfants a raconter. Des histoires les plus moches aux plus pathétiques, parfois comiques. Au boulot je mets mon costume et j'installe (j'aimerais dire le plus naturellement du monde) cette distance qui fait de moi la professionnelle que je suis. Et puis parfois il y a une histoire qui vous tombe sur le coin de la gueule sans crier gare. On est humain après tout. Je pourrais me lancer dans une litanie sans fin contre les politiques qui ont toujours d'autres priorités, contre les politiques toujours plus répressives et toujours plus cruelles, contre l'aveuglement de la société qui est toujours derrière le mauvais méchant et l'écroulement de cette même société dans laquelle certains paient un prix très lourd. Sur la saturation du système. Je pourrais me dire et redire qu'on ne peut sauver tout le monde, qu'il y en a des milliers qui souffrent et dont j'ignore tout, que cette histoire n'est pas si grave et que je ne suis pas responsable. Je pourrais oui, mais demain alors. Ce soir je me sens abattue, le coeur flingué par cette enfant. Ni guimauve ni sentimentalisme ni apitoiement. Cette petite fille a l'âge de la mienne et la juste distance m'a fait défaut. Aujourd'hui je suis rentrée chez moi retrouver un homme qui m'aime et qui m'accompagne même quand j'ai le coeur flingué. Je suis rentrée chez moi pour retrouver ma fille que j'ai mise au lit après l'avoir serrée tout contre moi et lui avoir dit combien elle était merveilleuse. Je suis rentrée chez moi me faire couler un bain chaud pour oublier la misère qui m'entoure. Je ne dors pas dans la rue, je ne suis pas séparée de ceux que j'aime, j'ai des amis sur les épaules de qui je peux pleurer sur le malheur des autres. Note à moi-même: tu as de la chance, ne l'oublies pas.