samedi 11 juillet 2015

Un gragon en été

Ce 11 juillet je le dis, les vacances sont là et entamées. L'école est derrière. Pas loin derrière mais déjà dans le rétro. Les filles sont parties pour le second round des vacances pastorales chez les grands-parents. 

Je vais pas faire ma nostalgique mais quand même. Cette fin d'année était un peu particulière parce qu'elle sonne la fin des maternelles pour ma grande et la fin de la classe d'accueil, grande nouveauté, pour ma ch'tiote. On a couru dans deux écoles différentes pendant dix semaines, à devoir aménager les horaires de chacun, respecter le rythme des enfants et les 1214 activités du mois de juin. 

On a couru et maintenant on souffle. 
 
En farfouillant mes brouillons virtuels j'ai retrouvé cette petite bafouille que j'avais écrite un matin, un peu excédée, beaucoup épuisée. Et ça disait:

"... Ca a commencé à 4h du matin quand ma grande s'est levée et m'a réveillée pour savoir si elle pouvait aller faire pipi. Premières angoisses, est-ce que je vais pouvoir me rendormir? Est-ce que mon mal de dos va me laisser en paix? Est-ce que je vais pouvoir ne pas penser à la journée qui s'annonce? 6h30 le réveil sonne. Je suis crevée, j'ai pas envie et je retarde l'extraction mais de 6 minutes seulement parce que vraiment ce matin je voudrais être plus tôt au boulot. Je trie le linge sale qui traîne et encombre la salle de bain. Je prends ma douche, je renonce à une petite épilation du matin "vite fait bien fait". Je ne voudrais pas faire de conneries (oui je suis la fille qui s'est coupée au mollet et a sur-infecté, je suis la fille qui a du courir derrière son chat parti avec une bande de cire collée sur le dos et je suis la fille qui enceinte a voulu..., ouais bref, ça vous ne voudriez pas le savoir). A 6h53 je réveille les troupes et à 6h59 je n'entends pas la météo (je suis obsessionnelle de la minute météo). Je n'entends pas les nouvelles non plus. Je cherche désespérément mon pull dans les 3 mannes de linge pas encore pliées. Là, je me rends compte que l'autre enfant ne m'a pas appelée pour faire pipi à 4h du matin. Je change donc toute sa literie pendant que le père rince l'adorable petite chose. Habillée mais pas coiffée ni maquillée, je suis venue à bout de deux tenues vestimentaires, une queue de cheval et deux couettes. C'est un miracle quand on pense qu'il aura fallu 15 minutes à ma grande pour mettre une chaussette et une culotte. Parce que bien sûr elle s'est construit un nid derrière la porte de la salle de bain avec les essuies, tout contre le chauffage. Je lui dis et redis de remettre les essuies en place. La petite soeur se trimballe avec 3 sacs à mains - indispensables à son bonheur - et un livre. Finalement le tout finit dans mes bras pour descendre prendre le déjeuner pendant que le père se douche. Évidemment personne n'a pensé à sortir un pain du surgélateur ni à passer chez le boulanger pour en prendre un frais. Ce sera des céréales pour tout le monde. Je ne pose pas la question, je ne veux pas débattre, le matin il n'y a pas de démocratie qui tienne. Je suis trop occupée à ranger la cuisine, à regarder avec effroi et stupeur la quantité de graisse encore dans la poêle d'hier soir, qui a servi à cuire mon morceau de viande régime, manifestement pas si régime que ça. Je repense vaguement à l'échange sec sur cette question la veille avec le gentil mari qui me soutenait qu'un oiseau sans tête ce n'était pas si gras. J'avais raison, il avait tort, c'est trop tard (ou trop tôt) pour revenir dessus. Je programme une machine avec les draps "mouillés". Cent fois j'appelle ma petite pour manger les céréales. Le père descend et rallouille discrètement parce que personne n'a rincé la cafetière de la veille. Je souffle 6 secondes pour mélanger mon son d'avoine et faire un commentaire sur Facebook au sujet de l'allaitement. Là - tout à propos - le père me parle des vacances. Il faudrait qu'on réserve, qu'on se décide. Oui, c'est vrai, j'ai pris la décision il y a 3 mois et je n'attendais que sa confirmation pour faire la réservation. Mais ON n'a rien fait. On grogne. Ma grande me harcèle au sujet de son doigt qui lui faisait mal mais qui ne lui fait plus mal et qu'elle voudrait quand même un sparadrap. Elle en profite pour demander quels animaux existent pour de vrai. Celui-là? Et celui-là? Et celui-là aussi? L'autre elle râle mais je ne sais pas pourquoi. Une histoire de cartes et de pinces à cheveux je pense. Je cours pour débarrasser la table, faire la collation du matin et de 16h (cette fois c'est juré, je ne vais pas les inverser, ni les collations, ni les cartables). Miel dirait ma bonne-maman, plus de fruits frais. Je descends à la cave chercher des carottes. Je constate que j'ai oublié de mettre un drap dans la machine. J'annule la programmation pour l'ajouter. Mais il faut des HEURES pour que la porte s'ouvre ! (En vrai 1 minute). La grande crie du haut de l'escalier "c'est qui à la cave? - c'est moi...ton père est en face de toi...". "Quoi tu veux? - je veux un sparadrap!". Mais prends le bon sang! Je remonte, j'épluche une carotte. Le père est monté à la salle de bain. Je lui crie de se magner quoi qu'il fasse parce que je voudrais me préparer. Je demande cent fois aux filles de mettre leur chaussures. La grande hésite. Hésite encore. Hésite toujours et finit par mettre celles qui ne vont pas avec sa tenue du jour. La petite elle compte toujours ses cartes, décide de ne pas mettre de chaussures. Et pendant ce temps le père est toujours à la salle de bain, et les filles me posent des questions, et je râpe les carottes, et le temps file. Alors je dis de ma voix la plus posée "maisnomd'unchiendeputaindebordeldemerdedesaracejefaistoutdanscettebaraquealorsquandjedemandedefairequelquechoseonm'écoute!". Voilà. La grande elle me regarde et dit qu'elle veut juste mettre son sparadrap. Le père descend - oui - et s'en occupe. Elle râle, c'était à l'autre doigt. Je claque deux bisous d'amour sur la tête à mes filles et je déclare que je démissionne! Je monte me brosser les dents et que chacun se débrouille! Tac! Mais alors que j'ai la bouche pleine je crie quand même à ma grande d'être bien attentive pour son brevet piéton (la petite me confirme qu'elle le sera). Et je lance des 'je t'aime' senteur mentholée. Le père il me souhaite une bonne journée, je marmonne un "c'est ça". Tout le monde est parti, il est 8h27. Trois minutes pour être au boulot ça va être juste. Je saute dans mes baskets, j'attrape mon téléphone. Je n'ai pas eu le temps de boire mon café. Sur le chemin du métro je constate que je n'ai pas mis de déodorant, ni de parfum. Bon. Je monte le son de mes écouteurs, ce matin ce sera Topboy des Infadels. Et comme je dépose ces petites lettres sur mon écran, le père m'envoie un message, il est désolé. Moi aussi, je suis un 'gragon' comme disent mes filles...".

Ce matin là n'était pas à l'image de ce que sont tous nos matins. Il y en a eu des pires et des biens meilleurs. Il y a quelques mois j'avais découvert sur le blog "Mommy shorts" les "Monday Mornings Series". Un portrait photo de ces heures matinales particulières aux mères. J'y pense souvent quand j'ai le T-shirt humide avant même d'avoir atteint le trottoir. J'y pense et je vois le bon, tout le bon. Je vois la petite main dans la mienne, celle du bébé que je n'ai pas pu conduire ni chercher à la crèche pendant de longs mois. Mais que chaque matin désormais je dépose à l'école. Juste elle et moi. Le bon, tout le bon. 

Maintenant ce sont les vacances. Ce sont quatre petites mains qui me font des câlins - toujours à l'aube. La brise fraîche du matin fait danser les rideaux et les rayons du soleil. Je me fiche de la météo. Elles rient et personne ne court. Ce sont les vacances, c'est sûr. 
 

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