dimanche 22 janvier 2012

De l'art de cultiver les fleurs


                 © Chloé Bingen
The North is to South what the clock is to time
There's east and there's west and there's everywhere life 
I know I was born and I know that I'll die
The in between is mine
I am mine

Pearl Jeam - I am Mine

2012. Bonne année. Le moment des (bonnes) résolutions s'il en faut. A cette occasion je me suis offert le luxe d'un petit cadeau à moi-même en guise de bonne résolution. Cette année je me dis que je suis quelqu'un de bien, j'y crois et j'assume. Difficile exercice. Mais si ce n'est pas à mon âge (pas si avancé mais plus si jeune) que je m'y mets, quand alors? Faire sa propre éloge ou du moins s'envoyer quelques compliments est un art difficile.
Le premier écueil en ce qui me concerne (et la première réflexion qui me vient) c'est que c'est d'une prétention sans fin. D'avance je pense à tous mes défauts. Quel dommage. Pourquoi devrais-je justifier mes qualités en les assortissant d'un bon nombre de défauts. Pourquoi n'est-il pas possible ou si mal aisé de se dire "mais oui j'en vaux la peine". Si une grande marque de cosmétiques sans éthique peut s'offrir ce slogan, ma petite personne engagée n'a pas de raison de s'en priver. Et puis en toute mesquinerie et suffisance, si des tas de cons se permettent le luxe de se trouver bien... Allez, je me lance... Pendant mes études mon maître de stage me disait souvent que si j'étais capable de faire d'excellentes critiques et remises en question, il fallait que je travaille l'acceptation de mes qualités. Quelle idée me disais-je à l'époque! Pourquoi perdre son temps à travailler cela? Qu'importe ce qui est bien fait, ce qui compte c'est ce qu'il faut encore changer, améliorer. Elle m'avait pourtant prévenue que cela me causerait du tort. Et elle n'avait pas tort. Progresser, s'éveiller, grandir, c'est aussi partir de ce que nous sommes, de ce qui est bien acquis et sur lequel nous pouvons compter. Pour 2012 (mais j'avoue j'avais entamé l'exercice en 2011) je me suis mise à l'écoute des compliments (tadaaaaa). Et je vous livre quelques perles sur "mon engagement, mes qualités professionnelles, ma fidélité en amitié comme en famille, l'excellent chef que je ferais, mes analyses fines et justes, mon écriture de qualité (nous ferons l'impasse sur l'orthographe), ... Et d'autres encore toutes aussi douces à mon coeur. Bref, ce ne sont pas les compliments eux-mêmes qui comptent mais, d'une part me rendre compte qu'il y en a, et d'autre part les entendre. Je suis contente d'avoir fait ce pas. La reconnaissance de nos qualités ne vient pas toujours de là où nous le souhaiterions et c'est d'autant plus rare qu'elle vienne de nous mêmes. J'insiste sur le côté altruiste (mais oui) de ma démarche aussi paradoxal que cela puisse paraître. Si tu ne commences pas par t'aimer toi-même, comment être aimé de l'autre? Est-ce si mal de se faire un peu de bien et d'être fier de soi? On ne peut pas tous être des héros de la sphère publique. Mais on peut tous se dire que finalement, quelque part, on est quelqu'un de bien. Et on peut être fier de soi. Parce qu'on est un bon cuisinier (sans être chef étoilé), parce qu'on peut bien écrire (sans être le Goncourt de l'année), parce qu'on joue bien de la guitare (sans être un artiste connu), parce qu'on est de bonne écoute (sans être un psy), parce qu'on peut diriger une équipe efficacement (sans être un dictateur). Je termine intentionnellement mes exemples en citant les qualités de chef parce que c'est une petite anecdote professionnelle qui m'a donné envie d'écrire ce billet d'humeur. Et qui m'a piquée suffisamment au vif pour me sortir de ma léthargie d'employée de niveau 2+ (j'avoue, je me mets à nu). Passons les détails mais disons que dans une réflexion sur un plan de carrière (chose dont je ne suis pas fan mais sur laquelle il faut à un moment s'arrêter ne fusse que pour remarquer que l'on n'en a pas) je me suis heurtée à la hiérarchie. Plus précisément à ce que certains supérieurs hiérarchiques pouvaient penser de ceux occupant les postes "d'en bas", nous les sous-fifres... Il leur semblait invraisemblable que nous puissions un jour occuper leurs postes et plus encore même que nous imaginions pouvoir le faire. Mince, la claque. C'est donc ça que "là-haut" ceux qui nous dirigent pensent? Aïe. Je ne serais donc pas grand chose à leurs yeux? Juste une déléguée dans la masse, considérée comme une enfant plus ou moins sage. Mais qui n'en reste pas moins une enfant, une petite chose qui surtout ne doit pas s'imaginer être ailleurs que là où elle est. Aïe. Et là, au détour d'un couloir et d'un échange avec une amie pleine de sagesse (et d'humour) je me rappelle qui je suis, ce que je suis. Pour ma part, une fille de bonne famille, bonne éducation, bonne école, bonnes études, connaissances culturelles diverses et variées, avec des convictions assumées, des goûts aussi fins que surprenants, ayant voyagé, parlant plusieurs langues, avec de nombreux amis, un homme, une fille incroyable, des chats de cirque et quand je veux, j'ai même un langage châtié. Je ne suis pas cette fille déconsidérée par ces personnes déconnectées de la réalité que sont mes supérieurs hiérarchiques. Rappelle toi Chloé, tu te fiches de ce qu'ils pensent, tu vaux mieux que ça, tu es au dessus de cela. Tu es cette fille pleine de qualité qui peut être fière d'elle. Tu es entourée de personnes pleines de qualités qui peuvent être fières d'elles. Et puis de quelques tristes personnages aussi. Ne pas convenir à tous ne fait pas de moi quelqu'un de moins bien. Tout cela est peut-être limpide pour certains depuis longtemps mais je suis nouvelle ici. Il y a peu de temps que j'ai découvert que l'approbation de l'autre n'est pas tout, celle de soi-même et de notre propre équilibre est toute aussi importante, plus importante même. Et tant pis pour le grand équilibre cosmique (merde alors). C'est ça finalement l'histoire, c'est à moi de me définir. Je n'ai pas à rougir de qui je suis. Demain je ferai la liste de mes défauts (dont la prétention et l'arrogance seront les têtes de liste) pour compenser ce trop plein d'amour de moi-même et ce manque d'humilité. Je ne cache pas qu'écrire cette petite bafouille a été très difficile mais je veux aller jusqu'au bout de la démarche. Il le faut, je me le dois. Je m'assume comme personne terriblement chouette. Na!

J'ai connu un garçon dont le poisson rouge changeait de couleur quand il était amoureux et à qui j'ai offert un vase pour mettre les compliments dont il ne savait que faire. Ce billet est pour toi mon ami.